BENOIT DEGLA «.. des citoyens ont voulu mettre en mal les hôtes que nous avons reçus…ce sont des comportements répréhensibles »

12 août 2013

BENOIT DEGLA «.. des citoyens ont voulu mettre en mal les hôtes que nous avons reçus…ce sont des comportements répréhensibles »

Sieur Benoit DEGLA-Ancien ministre de l'intérieur-Photo: Sinatou Saka
Sieur Benoit DEGLA-Ancien ministre de l’intérieur-Photo: Sinatou Saka

Quelques jours avant sa sortie du gouvernement, Benoit Degla, ancien ministre de l’intérieur a répondu mardi à nos questions et à ceux de nos lecteurs. Il revient sur le fâcheux incident du 1er Août et annonce la  création de plusieurs prisons.  Sécurité nationale, politique, sécurité routière, révision de la constitution, image de la police, société, il s’explique.

Vous pouvez aussi suivre un extrait sur Youtube

Bonjour Monsieur le Ministre,

Sinatou.Saka-Vous avez lancé une campagne de soutien à la révision de la constitution, pourtant cette question ne fait pas l’unanimité, ne craignez-vous par des heurts ?

Benoit Degla : Je ne crois pas. Nous sommes dans un Etat de droit et notre constitution garantit à chacun la liberté d’expression et de penser. S’il y en a qui pensent que la constitution aujourd’hui comporte en elle certains éléments qui ont besoin d’être corrigés, ils peuvent l’exprimer. Et lorsque l’initiative vient du gouvernement, je pense que c’est de mon droit d’apporter à la population les raisons qui ont pu amener le gouvernement à apporter à l’assemblée nationale ce document. Parce que c’est un document qui va renforcer notre démocratie, la gouvernance économique et locale. Je pense que ceux-là qui pensent le contraire seront libres de le manifester mais cela doit rester dans le cadre des textes prescrits par les lois de notre pays.

Je ne voudrais pas revenir sur le cas malheureux du 1er Août où des citoyens ont voulu mettre en mal les hôtes que nous avons reçus en voulant investir la place de l’étoile rouge habillés de rouge uniquement pour saboter la fête.

Ce sont des comportements répréhensibles.

En la matière, la police aura en son temps, l’occasion de revenir sur les détails mais contrairement à l’information qui a été diffusé, je pense qu’il y a beaucoup de mensonges.

Et c’est dommage qu’il y ait dans ce pays des compatriotes qui ne vivent que par le mensonge.

 

*Nous avons lu entre autre que c’est pour mettre un terme aux crimes économiques. Ceci n’était pas déjà  réglé par la Loi portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin. Avec ce texte de loi révolutionnaire les crimes économiques sont imprescriptibles.

Dans la hiérarchie des normes de notre pays, la constitution reste supérieure alors si nous voulons renforcer les dispositions légales qui existent déjà, nous devons agir aussi sur celle-ci en matière de lutte contre les crimes économiques.

* Certains infèrent la révision à la directive de l’UEMOA en l’occurrence la création de la cour des comptes. Le Bénin en l’état actuel n’est en concurrence avec aucun état de l’espace. Mais au-delà en l’état actuel de nos finances peut-on ériger la chambre en une cour sachant tout ce que cela induit? (un siège les dotations, les indemnités, les équipements …) 
Dans la sous-région, le Bénin et le Mali sont les seuls avec une telle disposition dans leur loi fondamentale. Pour retrouver une certaine crédibilité sur la scène internationale, nous devons opérer ces changements.

2-Qu’apporterait la révision de la constitution aux problèmes de sécurité des citoyens ?

La sécurité est un pilier essentiel pour le développement de notre pays.

La révision de la constitution en aucun article ne porte sur la sécurité mais nous agissons pour que la révision se passe dans les conditions appropriées car c’est une action politique. Nous avons donc besoin d’avoir dans notre pays une atmosphère apaisée qui ne peut être garantie que par le dispositif sécuritaire mis en place pour permettre aux uns et autres de s’exprimer pour ou contre la révision. Mais tout cela doit se faire dans le respect strict des lois de la république.

3-Quel est le bilan de l’opération Djakpata à ce jour ?

L’opération Djakpata est une mise ensemble de plusieurs forces, polices, gendarmerie et armée. C’est une force mixte au service de l’Etat pour lutter efficacement contre les crimes de toute nature. Cette idée est née de l’analyse faite par le gouvernement de la situation sécuritaire hors de nos frontières et à l’intérieur du pays. La sécurité étant un vecteur essentiel pour le développement, le gouvernement a organisé le 18 avril dernier sur l’ensemble du territoire l’opération Djakpata pour intervenir rapidement et  mettre hors d’état de nuire les bandits de grand chemins et les délinquants de toute nature.

Nous pensons au vu des résultats obtenue, qu’elle va se pérenniser, couvrir progressivement l’ensemble du territoire et constituer une force de soutien mixte aux corps traditionnelles afin de représenter un facteur essentiel de dissuasion à toute tentative de commission de crimes.

A la date d’aujourd’hui, avec l’Etat-major et le comité mis en place de gestion des opérations, nous avons quand même réussi à déloger plusieurs bandits, plusieurs trafiquants de drogue, des délinquants de tout acabit. Plusieurs ghettos qui abritaient ces bandits ont été détruits et beaucoup de quartiers sont suffisamment sécurisés. Et cela se vérifie à travers, les commentaires des populations elles-mêmes.

Mais j’avoue que la sécurité est une quête au quotidien. Chaque jour, il nous appartient et il appartient à cette force très d’être vigilent. Et nous pensons que nous sommes dans cette lancée pour que dans notre pays la sécurité soit non seulement une affaire de tous mais que l’on puisse la garantir à toute la population pour qu’elle puisse aller et venir en toute inquiétude parce que sans la sécurité, il n’y a pas la paix et sans la paix, il n’y a pas de développement.

C’est pour cela que le gouvernement accorde une attention toute particulière à ces questions de sécurité.

Nous sommes très loin du taux de criminalité d’il y a quelques années. La tendance est très baissière. Et dans la sous-région, nous sommes un pays suffisamment sécurisé. L’insécurité zéro n’existe pas mais les forces de sécurité et de défense de notre pays sont investis d’une mission. Faire en sorte que le béninois ou l’étranger qui vit chez nous puisse aller et venir en toute liberté, qu’il puisse vaquer quotidiennement à ses occupations en toute quiétude et que le Bénin puisse vivre en toute sécurité indépendamment du contexte général difficile qui nous entoure.

 

* Le Bénin est donc plus sûr aujourd’hui ?

Le Bénin a toujours été sûr car lorsque vous regardez  la situation dans la sous-région, s’il y a deux pays qui peuvent se targuer d’être sûr, le Bénin pourrait figurer.

*Quelles dispositions avez-vous prises lorsque le Bénin a été classés au nombre des zones rouges par la France ?

Effectivement, une certaine presse a porté l’information ignoble faisant croire que le Bénin était un pays peu fréquentable. Je pense que c’est un tort injuste qui a été fait à notre pays. Le Bénin ne remplit pas les facteurs pouvant mériter cela. Le Bénin n’est pas plus dangereux que ceux qui nous entourent. Nos frontières sont suffisamment surveillées. A l’intérieur du pays, les mesures sont prises à travers la présence des forces de l’ordre. Nous faisons en sorte que tous ceux qui rentrent dans notre pays puissent respectent les lois de la république et que ceux qui viennent pour leurs activités et pour le tourisme puisse découvrir un Bénin en paix, un Bénin de quiétude et un Bénin sécurisé.

Donc l’information qui avait circulé faisant croire que le Bénin était une zone rouge est totalement fausse. Nous avons eu à le dire en son temps. Le Bénin ne mérite pas une telle publicité. C’était de l’intoxication, une fausse rumeur.

4-Combien a coûté l’opération Djakpata aux caisses de l’Etat ?

Nous avons 77 communes. Nous devrions pouvoir avoir au niveau de chaque commune un commissariat de police, une brigade de  gendarmerie, nous avons l’armée qui a des détachements dans certaines localités de notre pays et si toutes ses unités devraient être équipées, nous pensons que rien n’est fait pour dire que nous avons suffisamment investi. Nous avons acquis avec le concours de certains opérateurs privés un certain nombre de matériels roulants mais j’avoue qu’avec le nombre de véhicules que nous avions pu acquérir, nous sommes encore très loin du compte.

5-Les malfrats sont arrêtés tous les jours et naturellement les prisons ne désemplissent pas et les conditions des détenus sont de plus en plus exécrables. Quelle est votre politique carcérale ?

Le gouvernement béninois en est conscient. Il y a le travail que font la police nationale, la gendarmerie mais en amont, il y a ce que fait la justice. Les deux à savoir la structure en charge de la sécurité et la structure en charge de la justice doivent travailler intimement et je peux vous dire que nous travaillons ensemble et cela dans la vision du gouvernement. Nous ne souhaitons pas que nos prisons se remplissent. Nous souhaitons offrir à ceux-là qui ont des comportements délictuels et déviants une réhabilitation. Mais cela passe par une politique donnée. Et c’est à  cela le gouvernement s’attèle. Il y aura très bientôt les états généraux de la justice et ce point fait partie des dossiers qui seront abordés.

Le gouvernement a dans son programme la construction  de plusieurs prisons pour offrir aux prisonniers de meilleures conditions de détention.

 

*Vos perspectives sécuritaires à l’horizon 2025

La sécurité c’est au quotidien. Il y a le contexte socio-économique qui peut apporter des éléments nouveaux en matière de sécurité, il y a la situation politique qui peut créer des conditions difficiles.

Alors les projections ne vont pas en 2025 à part que nous réfléchissons à comment renforcer les capacités opérationnelles de nos forces de sécurité et de défense, comment les rendre d’avantage performantes et faire en sorte que quelque sorte les turbulences autour de nous, nous soyons toujours ce pays de paix, ce pays de sécurité.

Pour ce qui est des projections actuelles, c’est faire en sorte que les populations béninoises adhèrent à cette vision sécuritaire du gouvernement, qu’elles acceptent d’avoir un comportement citoyen lorsqu’elles se trouvent en face des forces de sécurité et de défense. Parce que  tout ce qui se fait c’est dans leur intérêt.

Nos frontières sont ce qu’elles sont, nous sommes visités par des milliers de gens, nous avons besoin de connaître l’identité de ceux qui sont sur notre territoire. C’est pourquoi à des heures données, nous avons instruit les forces de sécurité veillent au contrôle des pièces.

Je pense que tout ceci concoure à faire en sorte que nous puissions contrôler la sécurité  et contrôler la sécurité c’est accepter que les mesures qui sont prises soient respectés par tous.

Voilà ce que nous pensons de la sécurité, de ce qu’elle est aujourd’hui, de ce que nous voulons qu’elle soit demain pour le bonheur des béninoises et des béninois.

6-Il a été constaté que les policiers n’ont pas une bonne image auprès des béninois et qu’ils en souffrent.

Pourquoi et Comment allez-vous redorer leur blason  puisque dernièrement vous leur avez accordé des primes?

Qu’allez-vous faire pour rassurer la population et leur permettre de dénoncer le rançonnement ?

Il n’y a pas eu de primes spéciales accordées à la police. On se doit de reconnaître aux agents en uniformes le fait de se mettre au service de la nation pour sécuriser le pays, le fait qu’il accepte nous protéger.

Mais il y a, c’est vrai parmi les policiers, les gendarmes, des brebis galeuses. Mais nous demandons à la population de nous aider à les débusquer. Quand, c’est fait, les mesures sont prises.

L’année dernière, 17 policiers ont été radiés. A la gendarmerie, il y a eu une dizaine, dans l’armée il y en a eu plusieurs. Peut-être que nous allons publier les noms pour que la population se rassure mais nous ne pensons pas que ce soit la bonne voie. Mais ils savent, ces agents que lorsqu’ il se révèle qu’ils sont auteurs d’actes  inadmissibles et répréhensibles, il n’y a pas de complaisance.

Nous demandons encore une fois par rapport à l’opération Djakpata, ce sont des véhicules qui portent l’inscription Djakpata et qui ont des numéros.

Nous demandons à la population de relever le véhicule et l’heure chaque fois qu’elle va se trouver harcelé ou sous les menaces d’un quelconque agent se trouvant à bord d’un tel véhicule  et de nous le faire parvenir.

Il y a un numéro vert qui a été communiqué à toute la population, qu’on nous le signale et nous prendrons des dispositions.

Dès l’instant où l’on nous communique le numéro, l’heure et la zone où a eu lieu cet acte répréhensible, les dispositions sont prises pour mettre la main sur l’agent auteur d’une situation délictueuse.

Il faut aussi dire que le refus de la population à dénoncer est un frein pour nous dans le reformatage de la mentalité au niveau des agents.

Nous avons besoin de sensibiliser les forces de sécurité et de défense par rapport aux comportements vertueux qu’ils doivent avoir mais nous avons aussi besoin d’être aidé par la population qui doit nous tenir informé chaque fois que c’est possible de ces comportements que certains éléments de la police ou de la gendarmerie pourraient avoir.

Nous attendons cela et quand nous avons les informations, nous nous déplaçons pour aller vérifier et quand il s’avère que c’est réel, les sanctions tombent !

7- En matière de sécurité routière, je n’y comprends plus rien. Pouvez-vous nous dire si oui ou non le port de casque obligatoire est effectif ? Parce que tantôt on punit, tantôt, on laisse passer…

C’est un problème récurrent mais c’est un vieux problème. Aujourd’hui, il est en même temps, économique et sociologique. Et une situation comme celle-là, si l’on veut la régler, il faut faire beaucoup de sensibilisation et également de la dissuasion et chaque acteur de cette lutte le fait. C’est un appel que nous devons lancer à la population car il en va de la vie des usagers.

Nous sommes entrain d’organiser des réflexions intenses pour  trouver une formule qui obligerait tous les vendeurs de motos à mettre à disposition de leurs clients des casques. Je pense que cela se fait déjà. Dès l’instant où cela est  fait, il n’y a pas de raison que celui qui acquiert une moto ne puisse pas porter son casque. Il y aura la période de sensibilisation et la période de dissuasion.

Mais, il viendra également la période où nous allons déclencher sur toute l’étendue du territoire une opération nationale contre tous ceux-là qui refuseraient de porter leurs casques car il en va de leur vie mais  ils mettent  aussi en danger la sécurité des autres et également en difficulté notre économie.

Les réflexions sont très poussées et avancées pour que le port de casque entre dans la conscience et dans la mentalité des usagers de motos.

Et pour écouter l’interview en audio https://soundcloud.com/sinatou-saka/interview-benoit-degla

 

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